top of page

Shinjuku

          La grande Tokyo d’autrefois n’existe plus en tant qu’entité administrative et politique en soi depuis 1923, elle se divise en 23 arrondissements. Shinjuku (新宿) est l’un d’entre eux et se divise lui-même en sous-quartiers, parmi lesquels Shinjuku, le quartier principal autour de la gare ; Nishi-shinjuku, le quartier des gratte-ciel ; Kabukichō, quartier « chaud » de Shinjuku -c’est le cas de le dire- célèbre pour ses bars à hôtesses mais aussi pour la forte présence des yakuzas (membres de la mafia japonaise) ; Okubo, le quartier coréen de Tokyo ; Takadanobaba ou le quartier des étudiants ; Ichigaya, quartier commercial et enfin Shinanomachi, jouxtant le Stade Olympique de Tokyo ainsi que d'autres stades sportifs. 

* * * * *

          S’il ne devait exister qu’un adjectif pour décrire ce quartier, je choisirais électrique, mais ce serait trop peu pour exprimer toutes ses facettes. Shinjuku est d’abord un nœud, un centre névralgique. Un cœur qui bat et qui respire. La gare de Shinjuku voit passer quelques 2 millions de voyageurs journaliers et 3 millions en comptant ceux qui empruntent ses stations satellites. Il s’agit de la plus importante station du monde qui s’étale sur une dizaine d’étages, une cinquantaine de sorties et quelques kilomètres de couloirs et correspondances. Shinjuku garde son âme de nœud ferroviaire depuis la période Edo où elle était le premier relais entre Tokyo et Kyoto par la route du Tokaido et continue chaque jour de bouillir et trembler au passage des trains qui se croisent et s’entrecroisent. Si appréhender la gare semble difficile au premier abord (car plusieurs lignes de JR et de métro la traversent, mais encore elle est un point routier pour les autobus longue distance), elle se laisse facilement comprendre par la suite grâce à ses nombreuses indications et la gentillesse des passants qui perçoivent la détresse des touristes face à tant d’immensité. La gare fourmille d’autant plus qu’elle est connectée à de grands centres commerciaux dans les halls Lumine 1 et Lumine 2 qui mènent tout droit au quartier commercial en prolongement de la Koshukaido Dori.

          De ce pont à l’asphalte avalé par les voitures et les taxis quelque peu rétros, se dessinent les lumières qui façonnent Shinjuku : le morceau de Tokyo qui, dit-on, ne dort jamais et surtout, ne s’éteint jamais. Le jour, cet assemblage est déjà bien impressionnant, mais c’est la nuit qu’il se révèle au plus fort de ses couleurs. Les yeux ne se reposent jamais, titillés çà et là par d’incessants jeux d’enseignes au large spectre de nuances. Les oreilles se trouvent elles, brusquées par une cacophonie de sonorités : des magasins annonceurs de bonnes affaires aux chanteurs amateurs qui s’installent au coin d’une place ou encore des machines à sous hurlantes des casinos ouverts sur la rue. L’ambiance est frénétique et les trottoirs bondés, noir du monde qui fourmille au milieu des publicités sur écran géants. De ce côté-ci se concentrent les grands magasins d’électroniques tels Yamada Denki, Bic Camera ou encore Yamadoshi Camera, dressés sur plusieurs étages qui révèlent l’économie du Japon.

* * *

          En prolongement de ces allées agitées, le Kabukicho se dessine dans ses nuances rougeâtres et ses excès de toute nature. Auparavant, il n’était pourtant qu’un simple quartier résidentiel répondant au nom de Tsunohazu (角筈) et bâtit sur les restes d’une zone marécageuse devenue réserve naturelle. C’est après la Seconde Guerre Mondiale que le quartier prit un tout autre accoutrement : le Kabukicho doit son nom à la volonté de reconstruire, après la guerre le célèbre théâtre Kabuki en ces lieux, mais ce projet ne vit jamais le jour. Eh cependant, rien de commun, dans ce quartier, avec l’art raffiné du théâtre. Dans ces ruelles, les loisirs et plaisirs sont rois, poussant le vice à toutes les jouissances entre les Love Hotel, les Strip Show ou encore les soapland (ou ソープランド) c’est-à-dire les maisons closes, Sex Shop, saunas érotiques, salles de jeux… le tout au milieu des restaurants et de simples cinémas. Le quartier est très prisé des Salary Men qui, le soir venu cherchent un peu de réconfort après une longue journée de travail, parfois uniquement à la recherche d’un « host » ou d’une « hostess » (ホスト), homme ou femme dont on loue simplement la compagnie pour chasser la solitude et, parfois, le manque cruel d’affection (rappelons que la société japonaise est très travailleuse et que la mise en couple se fait plus rare et de plus en plus tard). Si le quartier est chaud, il n’est cependant pas dangereux. Il faut simplement faire attention aux arnaques dites bottakuri (ボッタクリ) qui consistent à proposer au pauvre touriste une heure de consommation d’alcool à volonté pour un prix dérisoire, mais au passage en caisse, la somme due est souvent 100 fois plus élevée que la promesse  de départ… Avec les JO prévus à Tokyo en 2020, la police et les associations de propriétaires se tiennent en garde pour lutter contre ces escroqueries. Nulle crainte, dès lors, de se balader dans ce quartier chaud d’ivresse, pourvu que l’on soit tenu au courant des pratiques qui peuvent exister et de ne pas accepter ce qui nous semble de prime abord démesurément accessible sans plus de renseignement.

* * *

          Un peu plus isolé de ces cascades de néons mais toujours en plein cœur de la ville, au milieu des buildings qui grattent le ciel un peu plus au nord et jouxtant le Kabukicho, point le Hanazono Jinja. Petit coin de silence et de recueillement aux tons crépusculaires de rouge-orangés sur fond de blanc, ce sanctuaire Shinto, l’un des plus importants de Tokyo, date du XVIIe (du début de la période Edo). Il est connu pour apporter le succès dans les affaires. Un certain nombre d’incendie ont détruit le bâtiment originel qui a, par ailleurs, subi les dommages de la Secondes Guerre Mondiale, ce qui explique les nombreux réaménagements et la contemporanéité de l’édifice sur des bases pourtant anciennes. Littéralement, le Hanazono signifie le Jardin des fleurs (Hana ou  花 signifiant fleur et zono / sono ou 園 signifiant jardin), en rappel à son appartenance d’autrefois aux Jardins impériaux. 

Dans l’enceinte du sanctuaire, un petit oratoire est dédié à la déesse Inari, initialement le Kami Shinto des céréales, puis des fonderies et du commerce et gardienne de la maison. Elle est symbolisée sous forme de renard et garantit la bonne croissance du riz tout en portant chance aux commerçants. 

* * *

          Plus bas et beaucoup plus au calme, c’est un véritable poumon vert qui s’est planté au sein de la ville. Avant d’être placé sous la gestion de l’agence impériale du Japon (agence gouvernementale chargée de la gestion administrative de la Maison Impériale du Japon), le Parc National de Shinjuku était une résidence de la famille impériale à la fin du XIXe siècle durant l’ère Edo. Il fut ouvert en 1906 après 4 années de travaux et l’apport du paysagiste français Henri Martinais, intendant au Château de Versailles. Détruits par les bombes américaines, il fut rouvert au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale après quelques aménagements.

Grand de 58 hectares sur une circonférence de 3.5 km, le Shinjuku Gyoen est l’un des plus grands parcs de Tokyo, feuillu de quelques 20 000 arbres dont 1500 cerisiers qui en font l’un des plus prisés de la capitale. Trois formes de jardin coexistent dans ce large cœur de verdure : un jardin Japonais abrite une maison de thé ainsi qu’une pagode juchée sur son promontoire au milieu d’un étang rempli de carpes et de tortues, un jardin Français et sa roseraie ainsi qu’un jardin Anglais dont la vaste étendue souligne les buildings qui se dressent au loin. Car la ville reste bien visible depuis cet îlot de naturel. Le Shinjuku Gyoen est une véritable respiration dans ce quartier Tokyoïte, un nouveau souffle calme et paisible où il fait bon se relaxer, loin des lumières et des cris pompants d’une ville qui ne dort jamais.

* * * 

          Enfin, de l’autre côté de la Gare, à l’ouest, le quartier d’affaires s’avère être un refuge panoramique pour dominer tous les gratte-ciel. Cette partie de la ville ne frétille pas de la même agitation. Nous sommes ici plutôt dans une ambiance studieuse et travailleuse, loin des amusements du Kabukicho. Il s’agit ici d’un ballet d’hommes en costume cravate qui déambulent de bureau en bureau. Nombreux sont les buildings à avoir inspiré les cinéastes et/ou eu une place particulière lors du tournage de certains films : le Shinjuku Park Tower est mis en scène dans Lost in Trasnlation qui révéla Scarlett Johansson de Sofia Coppola et abrite le célèbre hôtel Park Hyatt.  Et, parmi toutes ces tours qui donnent le vertige, se dressent les tours jumelles du Métropolitain Government de Tokyo, qui ont-elles-mêmes inspiré les cinéastes d’anime dans Godzilla Ghidorah, Mobile Fighter Gundam, Samurai Troopers ou encore Ghost in the Shell. Cubes de béton aux mille-et-une fenêtres, la mairie de Tokyo fut dessinée par Kenzo Tange, célèbre architecte et ingénieur qui travailla jusque 1941 pour le disciple de Le Corbusier Kunio Maekawa. Hautes de 51 étages avec quelques 3 souterrains, ces tours auraient coûté la bagatelle d’un milliard de dollars et vivraient du travail de 20 000 employés. Ces deux tours jumelles se trouvent liées par une arcade au-devant de laquelle se déploie une immense agora. Elles ressembleraient, dit-on à Notre-Dame, notamment à la nuit tombée lorsque les façades s’animent des lumières des bureaux. Chacune abrite un observatoire de 360° qui détaillent la ville devenue miniature à leurs pieds. C’est là la meilleure façon d’appréhender l’étendue de la ville, et, en cas de ciel bien dégagé, il est même possible de voir le Mont Fuji poindre sur l’horizon. Le plus impressionnant est encore de rester du haut de ce perchoir admirer le soleil tomber sur les buildings pour laisser place à la lune et son manteau de nuit. Alors le paysage s’allume des milliers de lumières qui transpercent les fenêtres et la ville prend une toute autre allure…

Et pour vous donner une petite idée de la fièvre électrique de Shinjuku... (et encore, ce n'est qu'un apperçu !)

Ma chaîne

Ma chaîne

Voir

En espérant vous faire voyager un peu avec moi... A très vite pour de nouvelles aventures ! 

___________________________________________________________________________

bottom of page